Permis auto : le pourquoi d'un examen pratique pas si simple à obtenir


Les examens du permis de conduire sont redoutés et la recette du succès est tenue secrète essentiellement par le fait qu'elle n'existe pas. En revanche les raisons de l'échec sont pratiquement toujours les mêmes : stress, loterie malchanceuse, surmotivation stressante, démotivation latente et finances légères.... Nina Belile vous livre les raisons possibles de l'échec au permis de conduire pour vous permettre de pénétrer dans les coulisses de l'examen...et si possible d'en éviter l'échec.


Il ne faut pas le nier, certains candidats échouent à l’examen parce qu’ils ne sont pas prêts. C’est notamment le cas lorsque l’élève a fait fi de conseils réellement bien intentionnés de son moniteur, et qu’il a forcé la main à l’auto-école pour obtenir une date au bout de 20 heures de conduite.
En dehors de ces cas, il y a aussi véritablement ceux qui sont prêts aux dires de leur(s) moniteur(s) de toute bonne foi, et qui sont pourtant bel et bien…recalés. Pourquoi ?...

Un examen complexe

Parfois pour une seule raison, mais souvent pour plusieurs réunies. Car l’examen pratique du permis B est bien plus complexe qu’un examen scolaire. Tout d’abord, si un candidat est particulièrement sujet au stress de nature et qu’il panique facilement, l’examen du permis de conduire peut s’avérer l’épreuve fatale par excellence. À la différence d’un examen scolaire où le candidat est censé être interrogé sur des sujets connus où l’environnement n’offre que peu d’imprévus, le candidat au permis de conduire, lui, fait face à un environnement en partie imprévisible.

De plus, au-delà de devoir se contrôler lui-même (ses émotions, ses paroles), le candidat est tenu de maîtriser également son véhicule pour ne former plus qu’un avec lui. Tout se joue dans l’immédiateté, aucune seconde supplémentaire pour réfléchir ne peut être accordée. En revanche, lors d’un examen scolaire, le candidat peut, lorsqu’il vient de recevoir le sujet en main, respirer et se rasséréner (lors d’un oral par exemple, le candidat dispose d’un laps de temps où il peut préparer son commentaire). Le candidat au permis de conduire, lui, doit « tout donner » dès qu’il faire démarrer le véhicule et doit faire face éventuellement à des situations qu’il n’a jamais expérimenté avec le même professionnalisme qu’un conducteur d’expérience.

Une épreuve mentale et physique à la fois

L’épreuve du permis de conduire peut s’assimiler à une épreuve très mentale, mais elle fait également jouer le physique. Ainsi, pour le candidat naturellement sensible au stress au point que certains signes physiques se manifestent (mains moites, mains et/ou jambes qui tremblent…), il va de soi que l’examen s’annonce plus difficile. Le fait de trembler sur la pédale (ah, les fameux calages incompréhensibles des candidats au permis…) ou de transpirer sur le volant occasionne un stress supplémentaire du fait que le candidat vient de commettre une erreur qu’il sait due au stress justement.

Car il y a calage par manque criant d’expérience, et calage dû à un stress non maîtrisé, lui-même dû à l’épreuve… Les trente-cinq minutes d’examen doivent normalement permettre à l’inspecteur de se faire une bonne idée, certes. Mais trente-cinq minutes lorsque l’on y pense, c’est très peu.

Et, à la différence du brevet des collèges, aucun examen continu n’existe. On ne vous fera aucune fleur si vous commettez une faute éliminatoire même si votre parcours est très bon depuis des mois et que vous êtes assidu. Et à la différence du baccalauréat, aucune épreuve ne pourra « compenser » vos fautes, pas plus qu’un oral de rattrapage.

Vous l’aurez compris, lorsque certains élèves s’avèrent particulièrement stressés de par leur nature ou leur personnalité, leurs facultés physiques peuvent les trahir. Certes, vous me direz : « il faut que l’élève apprenne à gérer son stress ». Mais clore le débat là-dessus… C’est sans compter dans un premier temps les pressions extérieures qui amplifient ce stress.

Les origines du stress

En France, le temps moyen constaté pour passer son permis pour la première fois est de 82 jours, soit environ trois mois. Mais pour pouvoir le repasser en cas d’échec, le candidat attend en moyenne cinq mois avant d’obtenir une nouvelle date. Il va de soi que ce temps pour beaucoup, est bien trop long pour une épreuve aussi « courte » (même si celle-ci paraît longue lorsque l’on y est confronté). Et dans les grandes agglomérations comme en région parisienne, cela peut prendre huit mois à un an si l’on a fait mauvaise pioche en ne s’inscrivant pas dans une auto-école dont les taux de réussite sont très bons.

Ensuite, il y a le nerf de la guerre : l'argent

Le coût moyen d’une formation pour une première présentation s’élève aux alentours de 1 200 €, ce qui n’est déjà pas rien… Mais la somme peut vite devenir indécente après le premier échec, car les délais de représentation à l’examen poussent à prendre encore et toujours plus de leçons à l’unité, en plus du prix de la représentation à l’examen. Or, en admettant que vous devez attendre cinq mois pour être représenté, faisons le calcul. Comptons que pour ne pas perdre la main, vous continuez vos leçons au rythme d’une par semaine pendant cinq mois, soit 20 séances de conduite à 40 € de l’heure (51,40 € de l’heure en moyenne à Paris), plus un coût de représentation à l’examen de 80 € par exemple… ce qui totalise 880 € et fait grimper la facture totale de la formation à déjà 2 080 €. Bien sûr, vous pouvez ne prendre qu’une leçon toutes les deux semaines plutôt qu’une par semaine, mais vous risquez de perdre en efficacité pour le jour J en vous en tirant pour un total de 1 680 € tout de même, ce qui reste une belle somme.

Le problème, c’est que plus vous investissez de l’argent, plus vous êtes susceptible à juste titre…de stresser. D’où pour certains le piège de l’échec à répétition, alias « la spirale de l’échec »…

Qui plus est, en plus de l’argent et du temps, le droit de passage à l’examen pratique n’est pas éternel. Si vous échouez cinq fois, vous êtes quitte pour repasser votre épreuve…du Code de la route qui ne sera plus valable, et repartir de zéro ! De quoi vous arracher les cheveux pour une épreuve qui coûte les yeux de la tête.

L’emploi conditionné par le permis

Autre pression énorme, celle de la nécessité de décrocher le fameux sésame pour être embauché et gagner sa vie ! C’est quitte ou double : soit vous réussissez du premier coup, et vous avez tout gagné, soit vous échouez pendant les 35 minutes où vous jouez votre carrière, et vous êtes bon pour payer une sacré somme supplémentaire…et rester demandeur d’emploi. Forcément, il y a de quoi ne pas être tout à fait zen le jour de l’examen.

La situation géographique

Vous habitez dans une zone pavillonnaire mal desservie par les transports ? La voiture vous changerait la vie ? Il vous faut donc passer votre permis : c’est ça ou bien vous êtres tributaire de maman, de votre chéri, ou êtes condamné à marcher tous les jours une heure à pied pour travailler ou faire vos courses…Là encore, l’enjeu est compréhensible, et le stress qui va avec aussi.

Ensuite, il y a ce que l’on appelle les petites injustices, celles qui font partie des aléas de l’examen et qui vont faire pencher la balance encore un peu plus dans un sens ou dans l’autre et le faire un peu ressembler à une loterie.

La loterie du centre d’examen

Eh oui, certains candidats seront plus chanceux que d’autres sur ce point, car certains parcours d’examen ressembleront à une promenade de santé alors que d’autres vous en feront baver des ronds de chapeau. Bien entendu, ceux qui se verront attribuer un centre d’examen dans une grande agglomération où la circulation s’apparente à une véritable jungle et où la signalisation est omniprésente maudiront ceux qui circuleront tranquillement dans une zone rurale dépeuplée… Certains devront passer par l’autoroute tandis que d’autres n’en entendront pas parler et ne dépasseront pas les 70 km/h… Sans compter que l’heure de votre examen peut également jouer…

Sans surprise, le taux de réussite à l’examen pratique à Paris en 2012 pour une première présentation est d’environ 44,3% contre 59,1 % pour la moyenne nationale
Totalement injuste, certes, mais votre moniteur aura réponse à tout pour balayer votre argument qui se veut pourtant innocent et sincère : « lorsque vous savez conduire, vous pouvez conduire n’importe où. » Vous aurez beau lui répondre : « oui, n’importe où je veux bien, mais pas le jour de l’examen », rien n’y fera. Vous pourrez toujours vous consoler en écoutant la chanson de Maxime Le Forestier : On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille, on choisit pas non plus les trottoirs de Manille de Paris ou d'Alger pour apprendre à conduire (oups, à marcher, pardon)…

La loterie de l’inspecteur du permis de conduire

En théorie, l’inspecteur du permis de conduire doit afficher une impartialité bienfaisante, une politesse discrète… Oui, mais il arrive manifestement qu’il se produise des abus.

À tel point qu’il arrive que les moniteurs eux-mêmes en restent pantois, comme ce moniteur de Haute-Vienne interrogé par le quotidien Le Populaire : « Aujourd'hui, il est presque impossible de savoir si un élève va avoir son permis avant de recevoir le document officiel. D’ailleurs, le plus souvent, on ne se prononce pas car le candidat peut faire un bon parcours et finalement, ne pas avoir son examen à la clé ». Ainsi, il arrive vraisemblablement que certains inspecteurs ne se forcent même pas à dire bonjour à l’élève, ou encore donnent des consignes à une cadence difficile à suivre, voire des ordres incohérents.

C’est une des choses que l’élève redoute le plus lors de l’examen : être « saqué ». Il est pourtant stipulé dans le rapport sur le recrutement et la formation initiale des inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière publié en octobre 2009 que les inspecteurs du permis « sont censés gérer seuls le déroulement des épreuves théoriques et pratiques en plaçant les candidats dans un climat favorable (conditions d’accueil, de confort et de sécurité optimales) ». Bien sûr, il arrive aussi que certains candidats affabulent et interprètent à outrance certaines attitudes d’un inspecteur. Mais, tout de même intriguées par le résultat à l’examen de certains de leurs élèves qu’elles jugent incohérents – et il est vrai que les moniteurs sont bien placés pour connaître les capacités de leurs candidats et juger du parcours le jour de l’examen puisqu’ils se trouvent dans le véhicule – plusieurs auto-écoles ont entrepris de répertorier les données afférentes à leurs centres d’examen, à savoir le taux de réussite selon les inspecteurs. Quelle ne fut pas leur surprise lorsqu’ils se sont aperçus qu’il pouvait exister de très grandes disparités entre les inspecteurs : entre 20 % et 80 % de taux de réussite en première demande en fonction de l’inspecteur ! (Source du site Internet Permis Pratique, article du 29 juillet 2012)

Communication en panne

En même temps, personne ne parlemente avec l’inspecteur pour « débriefer » en toute objectivité de la prestation de l’élève puisque même le moniteur n’a pas son mot à dire sous peine d’être accusé de favoritisme pour un de ses élèves, et que l’examen n’est pas filmé. L’inspecteur décide donc seul d’après son évaluation et remplit théoriquement seul la feuille de résultats où il va rendre son verdict.

Il existe toutefois un recours en cas de contestation du résultat de l’examen, mais qui n’a que très peu de chances d’aboutir (Voir le sujet : En cas de litige).


Le permis de conduire s’obtient certes en sachant conduire (en même temps un candidat débutant ne peut pas avoir l’expérience d’un chauffeur qui conduit depuis 20 ans), mais il existe également comme nous venons de le voir, des pressions extérieures et une part de subjectivité liée à l’épreuve qui peuvent faire échouer un candidat, et même, un bon candidat.



Nina Belile est l'auteure de ce sujet, ainsi que du livre Permis de galérer.

Le passage du permis B (auto), elle le connaît mieux que quiconque pour l'avoir obtenu en 2011 à l'âge de 30 ans, après un très long chemin semé d’embûches en tous genres.

Dix moniteurs différents, pas moins 118 heures de conduite, 6 000 € et la réussite en tant que candidat libre, au total son permis de conduire lui est revenu en termes de temps au passage d'un BTS (2 ans).

Si elle dénonce les failles du système d'apprentissage de la conduite en France dans son ouvrage, Nina Belile a également la volonté de faire partager sa longue expérience et ses conseils aux autres candidats dans les colonnes de Permis Pratique comme journaliste.


Retrouvez aussi Nina Belile sur le site web dédié à son livre : Permis de galérer

Jeudi 1 Février 2018


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